De quoi s’agit-il : Les crabes de l’estuaire de Gironde sont condamnés depuis des milliers années à marcher droit. Mais la jeune garde a décidé de renverser l’histoire.
On appréhende un peu en démarrant la lecture de La marche du crabe. On a en effet déjà vu bon nombres d’auteurs de BD ne pas hésiter à raconter les aventures d’une moule, d’un bigorneau voire d’une amibe pour les plus radicaux de la profession. Mais en général c’est un format de strip qui est utilisé pour ce genre décalé au cent millième degré. Trois cases sont suffisantes, une page à la rigueur pour savourer les aventures captivantes d’un mollusque et apprécier ses considération sur la crustacitude.
Arthur de Pins n’hésite pas. Après avoir réalisé un court métrage sur la même histoire en 2004 et remporté pour celui-ci le prix du public au festival du fim d’animation d’Annecy, c’est un album entier qu’il consacre aux aventures d’une espèce de crabe. Il se rajoute une difficulté : cette espèce est incapable de ne se déplacer autrement qu’en ligne droite d’avant en arrière, condamnée à ne voir que le même chemin toute sa vie de crabe, si tant est qu’existent des obstacles infranchissables aux extrémités de celui-ci. Cette contrainte de départ que s’impose le scénariste lui permet de dévider une histoire originale fourmillant de créativité. Son dessin bien reconnaissable, tout en ligne claire et aplats qui donne l’impression de collages multiples renforce le ton tragi-comique et absurde de la condition de ces petites créatures se faisant régulièrement malmener par des tourteaux, des homards, ou encore par des plagistes négligents susceptibles à tout bout de champ de les écraser avec leur pieds truffés de doigts.
L’auteur crée quelques personnages intéressants comme ce militant écologiste, barbu, toujours enthousiaste, sûr de lui et près à fournir une multitude de réponses savantes aux question que lui adresse sa progéniture. Bref le prototype du gars pour lequel on a du mal à en pincer (difficile de résister à un calembour parfois). Arthur de Pins parvient même à ménager un suspense terrible alors qu’une vertigineuse révélation en forme de questionnement existentiel est faite au lecteur en fin de ce présent volume.
Un long métrage adapté de cette série est en préparation. En voici le teaser.
Lafigue

Jeremy Mahot, ingénieur informatique de formation met dans cet ouvrage la géométrie et le minimalisme au service de la blague. Il décide ici de travailler avec des formes simples auxquelles deux bons yeux expressifs et une bouche habilement placée viennent insuffler de l’humanité. Dès lors, cubes, sphères, gélules prennent vie dans une ville stylisée. Le grain des couleurs et les quelques ombres posées ça et là suffisent à contrer la froideur qu’aurait pu développer ce style graphique tout en palette numérique.
Enfin une bande dessinée biographique qui ne se contente pas de dérouler platement le CV de la personnalité. Car il faut l’avouer, le genre du biopic produit des ouvrages bien souvent assez ennuyeux. L’exercice est difficile dans la mesure où tout est connu d’avance. Le cadre est ici identique voire encore plus risqué qu’à l’accoutumée. Les Rolling Stones sont connus de près ou de loin par la planète entière. On sait à peu près tous que Brian Jones est mort dans les années 60, que la formation a du fuir l’Angleterre pour échapper à des poursuites pour usage de stupéfiants, que les Hells Angels, assurant le service d’ordre de leur concert, ont réussi grâce à leur fine acuité dans la vigilance et la bêtise à tuer un spectateur er enfin on sait en général qu’ils ont sorti un album designé par Andy Wharol avec une braguette sur la pochette.
Si vous avez raté le début : Ralph Azham est détesté par l’ensemble des habitants de son village. En effet, pressenti pour être l’élu, il n’est finalement dépositaire que du don de voir les morts et les naissances. Régulièrement rossé par les villageois, il retrouve un peu de crédit auprès de ses concitoyens, en repoussant une horde hostile, ce qui va lui mettre un peu de baume au cœur pour entamer une quête périlleuse. Forcément périlleuse, parce que sinon c’est pas la peine de se casser la nénette à faire des quêtes à tous les confins du monde connu !