J’avais personnellement décidé de prendre la défense de cette catégorie de la population détestée par tout le monde. Après tout les bobos sont attachés à la culture, ils fuient le clinquant, ne cherchent pas les beaux quartiers et s’investissent parfois dans le monde associatif, voire dans la vie de leur quartier. Et puis il y avait un certain relent populiste et malsain derrière cette critique. Et bien souvent, voir le dernier des branchés vouer au pilori la « classe » des bobos popularisée par Libération avait le don de m’énerver. La chanson de Renaud avait fini de me vacciner contre cette bobophobie ambiante. C’était avant la lecture de Dupuy et Berberian.
C’est vrai que leurs travers ne compensent pas toujours leurs qualités. Snobisme, libéralisme, individualisme, hédonisme, négligé vestimentaire impeccablement étudié, sans parler de leur bunkerisation au seins d’îlots de copropriétés provoquant la gentrification des quartiers populaires. N’oublions pas l’impératif blasé : « soyons désinvoltes, n’ayons l’air de rien » comme le chantait Noir Désir il y a quelques années. Dupuy et Berberian ne cessent de dessiner des yeux mi-clos, des regards distants, ce genre de regard qui voit à travers vous comme si vous n’étiez pas là.
Les auteurs ont une connaissance fine du milieu et c’est au rayon sociologie qu’il faudra penser à ranger cet album.
Lafigue