La bataille d’Asgard – Thorgal

La série des Thorgal a toujours été teintée de bons sentiments et tout particulièrement Thorgal lui-même, héros noble, droit, ne se battant que quand on l’y oblige et n’aspirant à vivre qu’une simple vie d’homme, loin des dieux ou des pillages dont sont friands ses frères Viking. Les apparitions des dieux restaient épisodiques et ne transformaient pas la série en une saga fantastique. Mais ici ces deux éléments sont considérablement exagérés.

Après les débuts prometteurs de ce nouveau cycle, Yves Sente livre un scénario qui gâche la conclusion de cette histoire. On notera par exemple que les qualités de Thorgal ou Jolan sont sans cesse soulignées de façon excessive. La quête de Jolan débouche sur une bataille manquant de souffle et réglée en trois tirs de fléchettes. Ceci fait de son excursion au royaume des dieux vikings une joyeuse ballade de santé qu’il fait en compagnie d’une armée de bonshommes en chiffons tous droit sortis du magicien d’Oz. Un jugement de Salomon d’un Odin presque débonnaire règle la question de l’interdit bravé par le fils de Thorgal. Le dessin et sa colorisation tout à fait exceptionnelle ne suffisent malheureusement pas à pallier la faiblesse de l’histoire.

Quant aux férus de mythologie scandinave, ils en sont pour leurs frais. D’après un ami, spécialiste de la chose, les représentations des dieux sont truffées d’erreurs. Thor n’a pas la bonne couleur de cheveux. Plus grave, Odin devrait être représenté borgne (symbole du don de double vue entre passé et avenir). Sente en fait un avatar du Père Noël. Loki ressemble à un Ronald Mac Donald sournois alors que la tradition lui accorde des traits agréables.

Heureusement la partie traitant la recherche d’Aniel par Thorgal est suffisamment enlevée pour amener un regain d’intérêt pour ce tome des aventures de Thorgal assez décevant.

La Figue

Un nommé Boyington – L’escadrille des têtes brûlées

Bien loin du personnage incarné par Robert Conrad à l’écran dans la série « Les têtes brûlées » (Baa Baa Black Sheep en version originale), déjà buveur, indiscipliné et bagarreur, Pierre Veys nous libre un Pépé Boyington super alcoolique, super indiscipliné et super bagarreur, sans doute plus proche de la réalité. Le maître mot de cet album est le réalisme, tant sur la biographie du héros que sur le soin apporté aux avions et aux figures et tactiques aériennes.

La réalité est un peu sèche car on attend bien longtemps avant de voir Pépé commettre ses premiers exploits dans la Chine envahie par les japonais. Cloué au sol il doit ronger son frein avant de pouvoir se livrer à quelques acrobaties à bord, non pas encore du célèbre Corsair, mais du modèle P-40 dont la tête de requin dessinée sur la carlingue avant lui donne un air plus que hostile.On aurait souhaité que les coloris des personnages soient aussi réussis que ceux des différents modèles d’avion. En effet celle-ci est trop lisse pour un dessin aussi réaliste, y compris dans ses effets de dégradé, et donne un rendu assez froid qui donne l’impression d’avoir des personnages en cire plutôt qu’en chair et en os. De plus le mode de narration très ancré sur les bandeaux de textes des hauts de vignettes enlève beaucoup de dynamisme à l’histoire. On a plus l’impression d’un dessin illustrant du texte plutôt qu’ une action narrative avec une forte interaction entre le texte et l’image, caractère propre à la bande dessinée. Cela gâche un peu le réel plaisir qu’on a de retrouver un des héros de notre enfance. Mais l’impatience que le lecteur a de voir Boyington déployer tous ses talents sur le théâtre d’opération qu’on lui connait compense très largement les critiques qu’on peut faire de ce premier tome.

Lafigue.

La position du tireur couché

Le thème du truand qui décide de raccrocher les gants, pour enfin goûter à son petit coin de paradis qu’il s’est patiemment bâti au fil d’années passées en turpitudes, n’est pas nouveau. Celui qui a vécu par les armes peut il goûter à la paix ? N’y a t’il pas une sorte de justice invisible qui vient mordre la nuque de celui qui pense vivre sa retraite sans remords.

Plus que jamais les personnages imaginés par Manchette sont rugueux, les répliques sont sèches et il n’y a guère de place pour aller creuser la psychologie de personnages qui ne s’embarrassent guère de psychologie et autres sentiments dont il n’y a que faire dans un polar d’ailleurs. Et quand les sentiments s’expriment, ils sont violents : la régulière de Martin lui crache au visage ou dévaste son appartement, c’est selon l’humeur. La plupart des protagonistes sont des crapules dans ce roman, certains sont stupides et au mieux certains ne sont que simplement déjantés. L’action s’enchaine à merve