Bienvenue à BoBoLand

J’avais personnellement décidé de prendre la défense de cette catégorie de la population détestée par tout le monde. Après tout les bobos sont attachés à la culture, ils fuient le clinquant, ne cherchent pas les beaux quartiers et s’investissent parfois dans le monde associatif, voire dans la vie de leur quartier. Et puis il y avait un certain relent populiste et malsain derrière cette critique. Et bien souvent, voir le dernier des branchés vouer au pilori la « classe » des bobos popularisée par Libération avait le don de m’énerver. La chanson de Renaud avait fini de me vacciner contre cette bobophobie ambiante. C’était avant la lecture de Dupuy et Berberian.

C’est vrai que leurs travers ne compensent pas toujours leurs qualités. Snobisme, libéralisme, individualisme, hédonisme, négligé vestimentaire impeccablement étudié, sans parler de leur bunkerisation au seins d’îlots de copropriétés provoquant la gentrification des quartiers populaires. N’oublions pas l’impératif blasé : « soyons désinvoltes, n’ayons l’air de rien » comme le chantait Noir Désir il y a quelques années. Dupuy et Berberian ne cessent de dessiner des yeux mi-clos, des regards distants, ce genre de regard qui voit à travers vous comme si vous n’étiez pas là.

Les auteurs ont une connaissance fine du milieu et c’est au rayon sociologie qu’il faudra penser à ranger cet album.

Lafigue

Business circus – Dans mon open space

Bienvenue dans le monde l’Open Space, ce nouveau monde horizontal où les performances désormais individualisées se mesurent souvent à la manière dont chacun tente de se valoriser. Tout est bon : esbroufe, survalorisation de sa fonction, fausse rumeur, flagornerie auprès des chefs.

Nous sommes prévenus dès la page de garde en voyant un employé nager au milieu d’un banc de requins. Le traitement humoristique de la de bureau ne dissimule pas la dureté du trait donné par les auteurs à cet univers impitoyable. Cependant les tons pasels et le dessin caricatural utilisant des têtes d’animaux pour les personnages viennent adoucir les tacles appuyés que se font ces joyeux cols blancs

James emploie également de temps à autre un procédé affectionné par les dessinateurs publiés chez Poisson Pilote. Celui ci consiste à déguiser le personnage avec un costume qui exprime ses sentiments du moment. Il accoutre par exemple le stagiaire d’un costume de chasseur avec casque colonial quand celui-ci pénètre dans les locaux du marketing peuplés d’inombrables beautés féminies. Il l’habille d’une peau de bête quand il va assister à une réunion de commerciaux bas de front.

L’auteur évite l’éccueil de l’anecdote. L’entreprise n’est pas le cadre de petites saynètes mais bien le propos de cet album dont chaque gag d’une planche illustre un des mécanisme de l’entreprise. Un bien agréable manuel d’initiation à la vie en entreprise.

Lafigue

Larcenement moral (2)

Larcenement moral est de nature répétitive par définition. Mon combat ordinaire pour lire « planter des clous » ne fut pas simple.

Le retour de la vengeance du dernier combat ultime de la BD, qui ne veut pas se laisser faire, fut d’anthologie.

Figurez vous qu’après avoir terminé la première chronique de ce site appelée « Larcenement moral », j’ai voulu vérifier un détail de l’histoire comme dirait l’autre. Et à mon grand effroi, je constatai que j’avais sauté presque une dizaine de pages lors de ma lecture. Que devais-je faire ? Tout réécrire ? Certainement me suer cela m’eut fait si j’eus versé dans telle facilité. Et l’honnêteté dans tout cela alors ? Je devais la vérité à mes lecteurs, même si à l’époque de ces écrits bullesBD demeurait encore inconnue du grand Google. Mais alors quoi ? Et bien ceci : Larcenement moral (2). _Et là je dis comment, et où aller…et avec quel permission ? En effet cet oubli de 10 pages, alors que la chronique était déjà écrite, devait il sonner le glas d’une carrière criticale à peine commencée ? Etait ce la preuve que toute critique procède du grand n’importe quoi ? Avais je des prédisposition à parler de ce que je ne lis pas ? Et enfin fallait il que j’arrête le mélange fatal, alcool et bande dessinée qui était en train de faire de moi la plus grande tête de linotte de tout l’ouest civilisé du Pecos. _Et là je dis c’est encore la faute de Môssieur Larcenet. C’est vrai quoi. Lorsque j’expliquai dans Larcenement moral (1) que ces grandes planches de silence installaient le rythme de la réflexion, je ne me rendais pas compte que, plongé dans mes pensées, il pouvait se passer n’importe quoi : le vent, des lutins farceurs venant tourner des pages. N’importe quoi je vous dis. De plus, au vu de la variété des thèmes abordés, on pouvait facilement se détacher du simple fil de l’histoire et du coup sauter allègrement 10 pages. _Ma conclusion fut de me dire que si pour certains, le caractère intersticiel du découpage en vignettes de la BD, art séquentiel narratif somme toute, permet l’ouverture des portes de l’imagination au lecteur, ce caractère intersticiel était chez moi beaucoup plus développé et pouvait atteindre la fulgurance de 10 pages. J’étais donc un être doué de facultés extra mortelles. Il me fallait donc poursuivre dans la critique. Et je le ferai…

La Figue